"L’UE ouvre la porte à une restructuration de la dette grecque". Par Julien Toyer

, par  Bruno Arfeuille, Tribune libre
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« Pour la première fois depuis le début de la crise, des responsables européens ont reconnu mardi que la Grèce pourrait finalement devoir restructurer sa dette, une décision susceptible de raviver les tensions autour de la zone euro.

Comme la veille à l’issue de la réunion des ministres des Finances de la zone euro, le président de l’Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, a concédé qu’il pourrait être nécessaire d’avancer vers ce qu’il a qualifié de "restructuration douce" de la dette publique grecque.

Ceci pourrait se faire en contrepartie d’une mise en œuvre complète des réformes structurelles auxquelles Athènes s’est engagé lors de l’octroi d’un plan d’aide de 110 milliards d’euros en mai 2010 et d’une nouvelle série de mesures dès les prochains jours, a précisé Jean-Claude Juncker.

Les autorités grecques devront par ailleurs préciser très rapidement la nature et le calendrier de leur programme de privatisations de 50 milliards d’euros annoncé en début d’année.

"Si la Grèce fait tous ces efforts, alors nous devons voir s’il est possible de réaliser une restructuration douce pour la Grèce. Je suis totalement opposé à une restructuration majeure", a déclaré le Premier ministre luxembourgeois en marge de la réunion des ministres des Finances de l’UE.

Un responsable grec s’est immédiatement engouffré dans la brèche et s’est dit prêt à discuter si nécessaire d’une restructuration "douce" de sa dette, avant de revenir sur leurs déclarations quelques heures plus tard.

ÉTIQUETAGE

Si les propos de Jean-Claude Juncker représentent un virage à 180 degrés dans le traitement de la crise grecque, plusieurs autres ministres ont apporté des réserves sur l’opportunité ou la possibilité d’une telle décision.

La ministre française de l’Économie, Christine Lagarde, a indiqué qu’un rééchelonnement de la dette était exclu s’il s’apparentait à un "événement de crédit".

"Toute restructuration ou rééchelonnement qui constitueraient un défaut, ce qu’on appelle un événement de crédit, est hors de question", a-t-elle dit lundi soir.

Mardi, plusieurs diplomates ont par ailleurs indiqué que Jean-Claude Juncker était allé trop loin en employant le mot "restructuration", d’autant que des discussions à ce sujet n’ont pas encore vraiment eu lieu.

Lors de la conférence de presse finale de l’Ecofin, le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires Olli Rehn a d’ailleurs tenu à préciser que seul un "reprofilage" pourrait être envisagé.

"Si une restructuration de la dette ne fait pas partie des options, une initiative qui aurait pour but de maintenir l’exposition des investisseurs privés à la Grèce est possible", a-t-il déclaré.

"Dans ce contexte, un allongement volontaire des maturités des créances, aussi appelé ’reprofilage’ ou rééchelonnement volontaire, pourrait être examiné", a-t-il poursuivi.

QUESTION DE TEMPS

Quel que soit l’étiquetage retenu par les responsables de la zone euro, les analystes estiment qu’il ne s’agit qu’une question de temps avant que la décision ne soit prise.

Ils considèrent toutefois qu’il y a une différence importante entre une restructuration forcée impliquant une perte de valeur pour les créanciers et un rééchelonnement volontaire de la dette n’impliquant pas d’"événement de crédit" déclenchant le paiement de contrats d’assurance détenus sur la dette.

Les répercussions pourraient toutefois être de grande ampleur alors qu’environ 70% de la dette grecque est détenue à l’étranger, principalement par les banques françaises, allemandes et américaines, ainsi que par la Banque centrale européenne, qui est vivement opposée à cette perspective.

Une telle décision pour la Grèce pourrait aussi immédiatement inciter les marchés à se tourner vers l’Irlande et le Portugal, qui bénéficient eux-aussi d’un plan d’aide international afin de réorganiser leurs finances publiques.

La dette grecque devrait bondir à plus de 166% du PIB du pays l’an prochain, selon les prévisions de la Commission européenne rendues publiques vendredi, alors que la dette irlandaise devrait atteindre 120% du PIB et que le Portugal devrait franchir la barre des 100%. »
Julien Toyer

Article publié par tempsreel.nouvelobs.com le 17/05/11.

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